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Le musée de la datavisualisation ouvre ses portes !

Karen Bastien nous immerge dans les plus belles infographies

Après dix éditions à vous parler d’innovations dans les médias, on a décidé, nous aussi, de se lancer dans un nouveau format. La Média’Tech s’exporte sur les réseaux sociaux, avec des formats vidéos explicatifs de moins d’une minute… rendez-vous sur Instagram !

🎙️Média’Talk : On reçoit Karen Bastien, cofondatrice de WeDoData, une agence de datavisualisation.

🤖 IA quoi ? : Responsive Narrative Factory : l’outil du futur pour les médias ?

🌎 Vu d’ailleurs : Comment parler de la guerre en infographies, Reporters sans frontières aide des médias russophones grâce à un satellite, et un média contestataire mexicain né des cendres de l’agence de presse nationale.

📊 Infographix : Pourquoi LinkedIn investit dans le journalisme ?

« On veut créer une communauté de la datavisualisation francophone »

La Media’Tech reçoit Karen Bastien, cofondatrice de l’agence WeDoData, qui accompagne les médias (mais pas que) dans leurs projets de datavisualisation. Avec son équipe, elle a lancé en mars la première newsletter francophone 100% ''dataviz'' : Buena Vista Data Club. Elle revient avec nous sur les ambitions de ce nouveau rendez-vous mensuel.

Pourquoi lancer une newsletter 13 ans après la création de votre agence WeDoData ?

À WeDoData, nous sommes très impliqués dans la transmission : on a formé beaucoup de rédactions et de grandes institutions publiques à la datavisualisation. On souhaite expliquer les coulisses de nos projets et partager nos savoirs dans un esprit open source. Cette newsletter, on y pense depuis longtemps car nous sommes nous-mêmes très friands de ce format. On s’est aperçu qu’il n’y avait pas de newsletter francophone qui traite de la  ''dataviz'' comme nous le faisons, en alliant le fond et la forme, le tableau statistique et la visualisation.

Quelles ont été vos sources d’inspiration ?

On s’est fait accompagner par Jean Abbiateci [ancien rédacteur en chef adjoint du Temps, fondateur du média Bulletin, ndlr], un des grands maîtres de la newsletter. On se connait depuis plus de 13 ans, et à l’époque, il avait déjà les mains dans la data. De notre côté, on lit surtout des newsletters anglophones très pointues sur notre sujet, ce qui nous a amené à constater qu’il n’y avait pas de proposition francophone véritablement similaire.

Quel objectif vise WeDoData à travers la création de cette newsletter ?  

Je suis co-animatrice d’un groupe de datajournalisme qui compte plus de 250 journalistes, Datajournos. Il y a le désir de créer une véritable communauté de la ''dataviz'' francophone et cette nouvelle newsletter peut être la première pierre à l’édifice. On aurait un outil pour créer des événements et interagir avec cette communauté. Rien n’est formalisé pour le moment, mais cela pourrait prendre la forme d’espaces d’échanges, de formations, de concours… La communauté internationale est très active autour de la Data Viz Society [Organisation internationale qui promeut la datavisualisation, ndlr]. Même si nous n’en sommes pas là, c’est un modèle dont on peut s’inspirer.

A qui souhaitez-vous donc vous adresser, des néophytes de la data ou des initiés ?

Notre public habituel est constitué aussi bien d’étudiants en écoles de journalisme ou de design et d’experts que de gens dans les institutions publiques ou les médias qui aiment regarder la datavisualisation sans forcément la réaliser. On cherche à s’adresser à tout le monde, avec un ton pédagogique. On participe ainsi à la data literacy, l’acculturation à la donnée, et ça nous tient à cœur.

D’où votre volonté de proposer à la fois des tutoriels pratiques et de la veille de contenus dans votre newsletter ?

Exactement, notre offre éditoriale vise un double équilibre. D’une part entre un public fan de statistiques et un public fan de graphiques, et d’autre part entre des lecteurs qui veulent mettre les mains dans le cambouis et des lecteurs qui aiment juste regarder. Surtout, le lecteur ne lit pas tout de A à Z et il y a en a pour tous les niveaux : pour les tutos par exemple, il y a en a un « facile », un « medium » et un « expert ».

Vous formez une équipe de 5 personnes, quelqu’un est-il dédié à cette newsletter ?

C’est un travail collectif. J’organise le chemin de fer et c’est l’équipe qui produit les contenus. On s’appuie sur les profils particuliers de chacun : je suis la seule journaliste de formation de l’équipe, mes collègues ont des parcours de data scientist ou data designer. C’est une richesse d’avoir des références différentes, même si depuis plusieurs années on a mis en place une veille partagée des médias, sites ou blogs de spécialistes, comptes sur les réseaux et espaces de partage sur Flourish, Datawrapper ou Observable [plateformes de visualisation et mise en forme de données, ndlr]. 

Etes-vous satisfaite des premiers retours et résultats en termes d’abonnés ?

Oui parce que nous avons déjà presque 1 000 abonnés en un mois. Parmi eux, on retrouve des habitués, des clients, beaucoup de médias et d’agences web. Mais nous sommes conscients qu’il s’agit d’une niche. Nous n’avons pas de business plan, pas d’objectifs chiffrés pour l’avenir. L’idée est de se laisser quelques mois pour se roder et alors on pourra essayer de faire d’autres propositions à cette nouvelle communauté.

Et pour les prochains numéros de la newsletter, vous prévoyez du nouveau ?

Oui, nous aimerions faire venir des invités, non pas pour des interviews mais plutôt pour qu’ils interviennent dans nos rubriques tutoriels et recommandations. On prévoit aussi des sondages et davantage d’interactivité avec les lecteurs.

Propos recueillis par Christian Mouly

Responsive Narrative Factory : l’outil du futur pour les médias ?

Comment sera l’information en 2030 et surtout comment captiver les jeunes ? Ce sont les questions que se sont posées le Financial Times et le Knight Lab à travers une étude publiée début mars. 45 personnes de 18 à 25 ans ont répondu à des questions pour savoir ce qui les motiverait à suivre l’actualité. Selon les conclusions du rapport, il faudrait personnaliser les expériences de chaque utilisateur grâce à l’IA générative. Et le Financial Times se penche sur un outil développé par la BBC et l’Institute of Engineering and Technology destiné à laisser le contrôle du format aux spectateurs : le Responsive Narrative Factory.

🤔 Qu’est-ce que c’est ? Le principe de l’outil est simple : laisser le téléspectateur personnaliser lui-même les paramètres de sa vidéo : la durée, le contenu, le présentateur qu’il veut voir. Lors d’une table ronde pour présenter la technologie, diffusée en mai 2023, une vidéo montre comment cela serait possible : il suffirait d’activer des boutons pour changer les paramètres, un peu comme pour activer le sous-titrage. 

🛠️ Comment ça marche ? Il faut d’abord des métadonnées (des données qui donnent des informations sur d’autres données). Une vidéo est un peu comme un puzzle où il existe de nombreuses métadonnées. La machine détecte ces dernières selon les segments de la vidéo à modifier et fait le travail en les combinant avec d’autres.

💡Pourquoi c’est intéressant ? « La plupart des débats portent sur la découverte de contenus et pas vraiment sur la personnalisation du contenu lui-même », indique Ruud Van der Linden, cofondateur d’Infuse Video, qui participe au Narrative Responsive Factory. Et en effet, beaucoup de médias se concentrent à sortir leurs utilisateurs des bulles algorithmiques, qui les enferment dans un même sujet. Autrement dit, il est possible de choisir le type de contenu que l’on souhaite voir, mais pas de le personnaliser. 

C’est un point saillant du rapport du Financial Times. Il explique que les jeunes de 18 à 25 ans veulent une information qui leur corresponde. Et ça semble passer par le fond et la forme, comme le démontre le Responsive Narrative Factory. Conséquence : l’engagement devrait augmenter sur les contenus, précise le site du projet.

📈 Quel résultat ? La BBC a testé l’outil sur l’une de ses émissions phares : Springwatch, consacrée à la nature et aux animaux. Concrètement, le téléspectateur peut agir sur un nombre considérable de paramètres. Il peut par exemple choisir de ne voir que les oiseaux, ou que les oiseaux et les renards, ou bien de retirer les scènes où des animaux se mangent entre eux. Il est possible de choisir la durée du programme : une version courte, longue ou moyenne est proposée. Au total, il existe plus 3,6 millions de versions du même programme, le tout pour un coût égal à celui d’une version, vante le projet.

La même idée, pour d’autres formats pourrait être envisagée : « On pourrait contrôler la taille d’une interview par exemple », indique Ian Wagdin, responsable technologique à la BBC, lors de la présentation du projet. Pour le moment, peu d'informations ont filtré concernant les suites du Responsive Narrative Factory, qui n’est pas encore disponible à grande échelle. 

❗Nuance ? Le risque d’un tel outil serait de dénaturer les contenus. Un danger écarté par les participants de la conférence qui assurent que tout ne pourra pas être modifié et que le contenu narratif de base sera préservé.

Écrit par Thibault Linard
  • Raconter la réalité de la guerre par des infographies, le travail remarqué de Mona Chalabi

Comment ne pas déshumaniser quand on compte les victimes d’un conflit ? Depuis le début de l’offensive israélienne sur la bande de Gaza, Mona Chalabi, datajournaliste d’origine irakienne et prix Pullitzer 2023, semble se poser chaque jour la question. Pour le Guardian, elle met en infographie les maigres informations vérifiées qui filtrent hors de la zone de guerre. Avec une mission : que l’opinion publique ne s’habitue pas à un sinistre décompte quotidien du nombre de morts, de blessés et d’enfants en sous-nutrition. Sous son pinceau virtuel, les victimes sont représentées par des objets du quotidien, comme des baskets, leurs tentes ou des produits alimentaires. Les nombreux journalistes tués sont symbolisés par leur gilet pare-balle floqué « PRESS ». Des infographies qui connaissent un succès grandissant sur le compte instagram de Mona Chalabi, qui compte désormais 500 000 abonnés.

  • Au dessus des territoires russophones, un satellite pour la liberté d’informer

Svodoba, Liberté en russe. Reporters sans frontières (RSF) vient de lancer ce bouquet satellitaire de neuf chaînes de télévision et radio russophones, grâce à un satellite dirigé vers la Russie, la Biélorussie, les territoires ukrainiens occupés et les pays baltes. En partenariat avec des journalistes et rédactions russophones en exil, comme Novaïa gazeta et son rédacteur en chef Dimitri Mouratov, l’ambition est d’apporter « un journalisme indépendant et inverser la logique de propagande.» Pour contourner la mise en place d’un brouillage par le Kremlin, RSF dit s’appuyer sur une technologie de pointe d’Eutelsat, un des plus grands opérateurs mondiaux de satellites lié à l’Union européenne. À terme, le bouquet satellitaire comprendra jusqu’à 25 chaînes de radio et de télévision indépendantes.

  • AMEXI, un média contestataire né des cendres de l’agence de presse nationale mexicaine

« Nous n'avons plus besoin d'agence de presse, nous avons la mañanera (un point de presse quotidien effectué par le chef de l’Etat) ». C’est avec cette curieuse justification qu’Andres Manuel López Obrador, président de la République du Mexique, décide en avril 2023 la fermeture de l’agence de presse nationale Notimex, alors que le pays est régulièrement pointé du doigt pour des attaques sur la liberté de la presse. La rédaction était alors en grève depuis trois ans. Des cendres de l’agence vient de naître AMEXI, un média fondé par d’anciennes salariées de Notimex avec une rédaction presque exclusivement féminine. La ligne éditoriale est claire : parler en priorité des « conflits du travail, sociaux et syndicaux ». L’inspiration syndicale ne s’arrête pas là, puisqu’AMEXI a été créé avec l’argent des salariées sous la forme d’une coopérative. Une structure économique inédite pour un média au Mexique, qui repose sur un mode de prise de décision démocratique. De l’aveu de ses fondatrices, AMEXI a maintenant besoin de stabilité financière pour garder son indépendance et continuer à exister alors que se profilent les élections fédérales le 2 juin prochain.

Écrit par Josué Toubin-Perre
Infographie réalisée par Khadidiatou Goro

Et pour finir…

Pour vous « journalistes en mal d’inspiration », voilà la promesse d’agrémenter vos articles de comparaisons sorties de derrière les fagots avec ce « convertisseur stupide ». De quoi (enfin !) savoir combien de big macs vous pourriez vous enfiler en Roumanie avec 20 euros ou connaître la taille de Charles de Gaulle en balles de golf.