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đș Comment habiller la teÌleÌvision ?
Cette semaine on se plonge dans le monde de l'habillage teÌleÌvisuel avec Nicolas Famery de l'agence GeÌdeÌon. On parle aussi des revenus des journalistes indeÌpendants sur les plateformes, des proceÌs contre les entreprises d'IA ou encore d'une carte des climats.

Mais avant de commencer cette Ă©dition, exceptionnellement, un petit mot de la part de lâĂ©quipe de la MediaâTech.
Avec cette 13Ăšme Ă©dition, la newsletter de la MediaâTech 2024-2025 touche Ă sa fin.
Merci Ă vous, chers lecteurs et lectrices de nous avoir suivi ou rejoint au fil de cette annĂ©e au cĆur de lâactualitĂ© de lâinnovation dans les mĂ©dias.
Mais la fin de la newsletter nâest pas la fin de la MediaâTech !
On vous donne rendez-vous dans un mois, le 26 mai, avec une petite surpriseâŠ

Quâest-ce que les journalistes Philippe CorbĂ©, Vincent ManilĂšve ou encore Justine Reix ont en commun ? Tous trois produisent une partie de leurs contenus en indĂ©pendants : newsletters sur Substack, streams sur Twitch, vidĂ©os sur YouTubeâŠ
Et ils sont loin dâĂȘtre les seuls : de plus en plus de journalistes quittent leurs rĂ©dactions pour sâadresser directement Ă leur public. Pourquoi un tel virage ? Une quĂȘte dâautonomie, loin des logiques industrielles des mĂ©dias traditionnels.
Leur Graal : la personnalisation de lâinformation. Le format incarnĂ© sĂ©duit, portĂ© par des Hugo DĂ©crypte, Gaspard G, Charles Villa ou Simon Puech. Dernier exemple en date : Justine Reix, ex-VICE, qui signe une enquĂȘte sur la viande de brousse sur YouTube, avec 92 000 vues au compteur (and counting).
Et ça fonctionne : selon Philippe CorbĂ©, directeur de lâinformation Ă France Inter et auteur de la newsletter politico-amĂ©ricaine Zeitgeist (5 000 abonnĂ©s), « les gens sâinforment sur des groupes via des gens quâils connaissent, se rĂ©fĂšrent davantage Ă des personnes quâĂ leurs mĂ©dias », explique-t-il Ă La Revue des MĂ©dias.
Ăa, les plateformes de crĂ©ation de contenus lâont bien compris. Substack, lancĂ© en 2017, a capitalisĂ© sur une image de refuge pour journalistes post-plan sociaux aux Ătats-Unis pour sĂ©duire auteurs et lecteurs, rappelle Minted. Plus rĂ©cemment, câest VimĂ©o qui a suivi, avec VimĂ©o Streaming et sa vidĂ©o Ă la demande, sur abonnement, pour crĂ©ateurs.
Ajoutez à ça une vraie libertĂ© Ă©ditoriale, visuelle, identitaire, et, sur le papier, tous les voyants sont aux verts. Mais Ă quel prix ? TikTok et Instagram rĂ©munĂšrent entre quelques centimes et un euro pour 1 000 vues, selon Minted. Rapide calcul : un succĂšs Ă 100 000 vues rapporte donc⊠30 euros. Sur YouTube, câest un peu mieux - plusieurs euros pour le millier de vues, toujours selon Minted - mais il faut cavaler derriĂšre un algorithme modifiĂ© toutes les semaines.
Et Substack, alors ? Bon courage pour y gagner sa vie. « Tant que vous nâavez pas plusieurs milliers dâabonnĂ©s, vous ne gagnez pas de revenus dĂ©cents », confie un crĂ©ateur Ă Minted.
Bref : vivre de ses vues, câest possible. Mais cela demande un investissement colossal, et de composer avec des rĂšgles au mieux opaques, au pire dĂ©courageantes. Le tout, sans oublier sa dĂ©ontologie....

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Nicolas Famery est directeur artistique depuis prĂšs de 20 ans chez GĂ©dĂ©on, une agence spĂ©cialisĂ©e dans les habillages tĂ©lĂ©visuels. Avec son Ă©quipe dâune dizaine de personnes, ils ont créé les univers graphiques de chaĂźnes comme BFMTV, M6, Culturebox, W9, Franceinfo ou encore les JT de France 2. Il nous explique les processus crĂ©atifs et rĂ©flexions derriĂšre ce travail.
Quâest-ce quâun habillage tĂ©lĂ©visuel exactement ?
Câest tout ce qui constitue lâidentitĂ© visuelle dâune chaĂźne Ă lâantenne : la maniĂšre dont le logo sâanime, les bandes-annonces, les auto-promotions, les jingles pub, etc. Cela permet Ă la chaĂźne de sâexprimer, de promouvoir ses programmes ou de faire passer des messages. Cela va donner lâĂ©tat dâesprit de la marque. Lâobjectif est que chaque Ă©lĂ©ment visuel soit cohĂ©rent et transmette un Ă©tat dâesprit clair au tĂ©lĂ©spectateur. Notre travail est donc de crĂ©er des concepts qui vont exprimer lâidentitĂ© de la chaĂźne. On intervient Ă leur demande, souvent aprĂšs un appel dâoffres entre plusieurs agences. Si nous sommes sĂ©lectionnĂ©s, nous travaillons environ un Ă deux mois pour dĂ©velopper une identitĂ© unique.
Quels sont les ingrĂ©dients dâun habillage rĂ©ussi ?
Dâabord, la clartĂ©, câest essentiel : il faut que le tĂ©lĂ©spectateur puisse se repĂ©rer, savoir sur quelle chaĂźne il se trouve et ce quâil va regarder. Ensuite, une bonne idĂ©e : il faut un concept graphique qui correspond Ă la chaĂźne et la valorise. Et puis, je dirais, une certaine hiĂ©rarchisation des informations. Si on prend une chaĂźne dâinfo, il y a beaucoup dâĂ©lĂ©ments Ă lâĂ©cran : bandeaux, pictogrammes, textes⊠Il faut que tout soit lisible, sans surcharge. Câest un gros travail sur lâinterface et la lisibilitĂ©.
Par exemple, pour BFMTV, on avait instaurĂ© un bleu, trĂšs puissant, quâon retrouve notamment dans le bandeau dâinformations et qui est facilement identifiable. Et ce qui ressort des Ă©tudes qui sont faites, câest que câest ce bleu que les gens retiennent, et qui leur permet dâidentifier BFMTV quand ils zappent. Pour M6, en 2020, on a analysĂ© la perception de la marque. Leur constat de dĂ©part Ă©tait que M6 Ă©tait trop associĂ©e Ă la publicitĂ© avec, par exemple, les jingles pub avec le logo qui tournaient en 3D. On a donc repositionnĂ© la marque pour quâelle soit davantage liĂ©e aux programmes et aux contenus valorisants. On a gardĂ© le logo car il est trĂšs lisible et fort, et on sâest inspirĂ© du premier habillage de la chaĂźne en 1987, qui repose sur un jeu de formes et de couleurs. Nous lâavons juste remis au goĂ»t du jour, avec un jeu de formes et contreformes du logo. Et quand on voit quâune chaĂźne continue Ă utiliser un habillage quâon a conçu (comme BFMTV depuis 2019, NDLR) câest le signe dâun bon travail forme de reconnaissance.
Si on prend une chaĂźne dâinfo, il y a beaucoup dâĂ©lĂ©ments Ă lâĂ©cran : bandeaux, pictogrammes, textes⊠Il faut que tout soit lisible, sans surcharge.
Les jingles pub de TMC, qui ne sont pas produits par GĂ©dĂ©on, sont en grande partie rĂ©alisĂ©s par lâintelligence artificielle. Quelle est votre position sur son utilisation dans la crĂ©ation graphique ?
On sâen sert, puisque câest un nouvel outil. Il faut savoir doser son usage, mais câest une ressource au mĂȘme titre quâil y a eu lâarrivĂ©e dâinternet et de la 3D. Faire appel Ă lâIA peut ĂȘtre trĂšs dĂ©criĂ©, donc on essaie dâen faire un usage le plus raisonnĂ© et mesurĂ© possible. LâIA peut ĂȘtre trĂšs pratique pour gĂ©nĂ©rer des visuels Ă bas coĂ»t quand on nâa ni le temps ni le budget pour des tournages. Mais il est aussi important de continuer Ă faire travailler des photographes, rĂ©alisateurs, techniciens, donc câest une balance. RĂ©cemment, on a fait le gĂ©nĂ©rique de la Ligue 1 de football. Nous avons bien sĂ»r tournĂ© des plans avec des acteurs, mais le gĂ©nĂ©rique repose sur une succession de nombreux plans oĂč le logo Ă©tait prĂ©sent, et nous nâavions ni le budget ni le temps pour les tourner. Nous avons utilisĂ© lâIA pour complĂ©ter avec des images quâon nâaurait pas pu produire autrement. En fait, câest tout un Ă©quilibre entre avoir de la prĂ©sence humaine et cet outil qui nous permet de faire des choses qui parfois ne sont pas faisables dans le budget.
Est-ce quâil y a des tendances fortes en 2025 dans le design tĂ©lĂ©visuel ?
Ce qui domine, câest lâadaptabilitĂ©. On ne crĂ©e plus seulement pour la tĂ©lĂ©vision, mais aussi pour les rĂ©seaux sociaux, les plateformes, le mobile. Il faut que lâidentitĂ© puisse vivre partout, sur des formats variĂ©s. On essaie d'avoir des habillages qui sont plus agiles, qui se dĂ©clinent Ă 360°. Je dirais mĂȘme quâil faut se mĂ©fier des tendances ! Il faut avoir conscience de ce qui est Ă la mode, mais en mĂȘme temps savoir sâen affranchir pour crĂ©er des habillages qui soient pĂ©rennes et qui soient plus intemporels. En tout cas, Ă GĂ©dĂ©on, historiquement, nous avons toujours Ă©tĂ© trĂšs « flat design » (un style graphique en deux dimensions, « plat », NDLR).
Il faut avoir conscience de ce qui est Ă la mode, mais en mĂȘme temps savoir sâen affranchir pour crĂ©er des habillages qui soient pĂ©rennes et qui soient plus intemporels.
Lorsque lâon est une agence qui fait des habillages pour plusieurs chaĂźnes, comment Ă©viter de produire des crĂ©ations qui se ressemblent toutes ?
Tout part de lâĂ©coute du client. Si les besoins sont bien dĂ©finis, on peut crĂ©er une identitĂ© sur mesure. Par exemple, si vous arrivez en nous disant « je veux ĂȘtre une chaĂźne rĂ©gionale », on ne va pas avoir les mĂȘmes codes que si vous nous dites « je veux ĂȘtre le numĂ©ro 1 du divertissement ». Dans le premier cas, on aurait une approche plus humaine, avec des codes graphiques plus sobres au service de lâimage. Dans le second, on aurait par exemple une typographie plus grosse et des mĂ©caniques dâanimations plus importantes. On essaie aussi de partir du logo de la chaĂźne pour construire lâidentitĂ© autour. Dans ce logo, on va essayer de trouver des possibilitĂ©s dâexpression de la marque. Et cela va nous amener une certaine cohĂ©rence. Par exemple, quand on a refait lâhabillage des JT de France 2, on est partis du point dans le logo ·2. Ce point agit comme curseur pour raconter lâinformation, et crĂ©er des interfaces dans les diffĂ©rents journaux.
Quels sont les futurs projets sur lesquels vous travaillez ?
Il y a Ă©videmment une part de confidentialitĂ©, mais on a travaillĂ© sur lâhabillage de la nouvelle chaĂźne de tĂ©lĂ©vision « T18 », qui sera lancĂ©e en juin prochain. On lâa dâailleurs conçu avec Ătienne Robial, qui est lâun des maĂźtres de lâhabillage tĂ©lĂ© (Canal +, M6, La SeptâŠ) et qui, pour lâanecdote, travaille toujours avec un papier, un crayon, et une « grille » de composition pour ses logos !




Pour retrouver cette carte : Climate Zones

Disclose centralise les documents environnementaux en accĂšs libre
Le mĂ©dia dâinvestigation Disclose a mis en ligne un outil 100 % gratuit pour retrouver tous les documents publiĂ©s par les autoritĂ©s environnementales françaises en un seul endroit. Plus de 60 000 PDF sont ainsi accessibles, filtrables par dates, lieux et types de procĂ©dures. Un outil qui nâest pas sans rappeler Aleph, la grande base de donnĂ©es mise en place par lâOCCRP (Organized Crime and Corruption Reporting Project) au niveau mondial, Ă la diffĂ©rence que celui-ci sâadresse avant tout Ă des journalistes. Car Ă lâheure oĂč l'Ătat envisage de supprimer des consultations citoyennes, Disclose Data permet Ă tous, de sâemparer des projets agricoles ou autres plans d'amĂ©nagements pour sâinformer et Ă©ventuellement les contester. Il sera maintenu par lâĂ©quipe de Disclose, et continuera de sâalimenter automatiquement en contenus.
SOS Déonto : une hotline éthique pour les journalistes
Vous ĂȘtes journaliste et vous avez une question concernant un potentiel conflit dâintĂ©rĂȘt, le secret des sources ou le respect de la vie privĂ©e ? Le Conseil de dĂ©ontologie journalistique et de mĂ©diation (CDJM) lance SOS DĂ©onto, un service pour rĂ©pondre aux interrogations liĂ©es Ă la dĂ©ontologie. Les journalistes pouvaient dĂ©jĂ poser des questions, via la rubrique contact du site du CDJM. Les experts de la dĂ©ontologie ont souhaitĂ© Ă©largir et promouvoir cette aide, en offrant des rĂ©ponses plus personnalisĂ©es, sous 24h ou presque. La dĂ©lĂ©guĂ©e gĂ©nĂ©rale du CDJM assure que chaque cas est discutĂ© pour fournir des conseils qui tiennent compte du contexte Ă©ditorial et des spĂ©cificitĂ©s du mĂ©dia.
Afrikia, premier journal africain dĂ©diĂ© Ă lâIA
Câest une premiĂšre sur le continent africain : un mĂ©dia consacrĂ© exclusivement Ă lâintelligence artificielle. Son ambition ? « Rapprocher les innovations technologiques mondiales des rĂ©alitĂ©s africaines », selon son rĂ©dacteur en chef Yao Bernard Adzorgenu. Le site concentre des infos sur les nouveautĂ©s rĂ©volutionnant des secteurs aussi variĂ©s que la justice, lâagriculture ou le journalisme lui-mĂȘme. LancĂ© il y a 6 mois, il a bĂ©nĂ©ficiĂ© du soutien du Media and Digital Institute, une organisation Ă but non lucratif qui Ćuvre pour le dĂ©veloppement des mĂ©dias et du numĂ©rique en Afrique.
